Le projet se situe dans le hameau Lù Chatarme, à promité du village d’Arolla, au fond de la vallée du Val d’Hérens. Depuis l’origine de sa construction en 1860, le mayen permet d’abriter son propriétaire quelques mois dans l’année qui monte ici à 1850 mètres d’altitude pour faire pâturer ses vaches. Le projet débute dans le dialogue avec le paysan, avec l’usage du lieu et son histoire. Comment faire perdurer le caractère propre d’un mayen de montagne, tout en augmentant son potentiel d’accueil, d’habitat et de confort ?
La première idée du projet est de conserver la pièce principale en bois. Seul un escalier est créé, pour accéder à l’étage qui peut maintenant accueillir 6 personnes pour la nuit. Le bois utilisé ici permet de prolonger l’histoire du lieu, et même l’histoire familiale. En effet, celui-ci provient d’une petite forêt de mélèzes appartenant à la famille, où les arbres furent plantés à la même époque que la construction du mayen. Il semble que les arbres ont grandi à côté du bâti pour permettre à celui- ci de perdurer dans le temps, telle une solidarité de la nature à l’égard du construit. Un service rendu... appelant un retour.
Ce retour s’exprime, pour ainsi-dire, dans la transformation de la partie minérale du mayen. L’intervention ne va pas s’imposer au rocher, le détruire pour s’implanter en confrontation avec lui. Elle va plutôt se glisser délicatement entre la roche et l’existant. Les lignes du plan suivent celles du rocher, et la double hauteur s’érige contre lui, sans le toucher. L’intervention en béton est bien distincte de la roche. Pourtant, leur minéralité les rassemble, et leur unité s’exprime jusque dans la couleur de l’oxyde de fer présent dans la roche, rappelée par la menuiserie.
L’ambiance propre au mayen de montagne imprègne la construction du projet, et la façon dont sont chauffés les espaces. La construction en madriers est laissée brute, sans isolation. Les espaces, bas et sombres, sont chauffés lentement avec l’inertie du pierre-ollaire d’origine. Cet élément central d’un mayen trouve son écho dans la nouvelle cheminée en béton où le feu acquiert un tout autre statut. Complètement ouvert sur l’espace en double hauteur, il fournit une chaleur rapide et intense. La visibilité du feu, contrastée et révélée par l’apparence froide du béton, provoque une nouvelle ambiance. On peut alors y faire la ruschia ou la raclette, en contemplant les flammes et en écoutant le vif crépitement du bois.
COMMENTAIRE du jury
Cette réhabilitation d’un mayen (ferme montagnarde construite en 1860) poursuit l’esprit d’un savoir vernaculaire attentif au rythme des saisons. Le plan sanctuarise l’existant en faisant de la pièce à vivre le noyau spatial autour duquel se déploie une extension qui vient presque en tangence de la montagne. Cette extension est conçue comme un grand module équipé, voire une grande pièce de mobilier intégré. Depuis l’intérieur, l’expressivité du bois et du béton brut entrent en résonance, voire en contraste, avec les vues cadrées sur la roche regardée comme un tableau abstrait, renforçant encore cette impression d’être à l’abri dans un cocon à la conception millimétrée.
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