Le projet est issu d’un mandat d’étude parallèle SIA 143 remporté en 2013 auprès de la Coopérative les Ailes par Aeby Perneger & Associés.

Situation
Le bâtiment devait s’inscrire dans le plan d’urbanisme du futur éco-quartier des Vergers de Meyrin, son rôle urbain étant de venir compléter une série de trois tours disposées de manière oblique le long de la route napoléonienne qui mène de Saint-Genis-Pouilly à Genève. Ce faisant, elle devait marquer l’une des portes d’entrées au nouveau quartier, constitué pour l’essentiel d’un damier orthogonal de barres de logement placées parallèlement à la pente, entre le village de Meyrin et sa cité-satellite des années 60.

Programme
Le volume à construire devait s’inscrire dans un gabarit de 22m x 45m au sol et de 13 étages hors sol comprenant un socle de 2 niveaux répondant à la pente naturelle du terrain. Selon le vœu de la coopérative, le programme du bâtiment devait être composite et se déployer verticalement, du haut vers le bas, soit : environ 63 logements familiaux pour les coopérateurs, 22 logements protégés pour personnes âgées dotés d’un équipement d’accueil fonctionnant à l’échelle du quartier, divers cabinets médicaux et autres bureaux, enfin des arcades commerciales en lien direct avec l’espace public comprenant un magasin de quartier et un restaurant.

Caractère
Le pseudonyme de « tour » C3 attribué par le plan de quartier étant démenti par un gabarit plutôt compact prévu par ce même plan, le projet a rapidement cherché à s’éloigner de cette notion initiale de « tour » pour se rapprocher de celle d’un « mille-feuilles », simple construction affichant sereinement sa stratification programmatique sans vouloir insister sur une verticalité absente. Il en a résulté un objet singulier, non dépourvu de complexité.

Forme pivot à l’entrée du nouveau quartier des Vergers du fait de sa situation isolée, le bâtiment affirme une présence particulière, à mi-chemin entre l’ancêtre et l’observateur extérieur, entre public et privé, à la fois objet unique et composite, d’une matérialité actuelle mais difficile à dater, contribuant à définir fortement la place publique de la Diversité à ses pieds tout en gardant le regard tourné vers l’horizon. Constitué de plateaux horizontaux aux pourtours doucement plissés, il empile des formes d’étages diversifiées dans un ensemble additif, légèrement expressionniste par son dessin mais apaisé dans ses matériaux et ses proportions, cherchant l’équilibre entre dynamisme et tranquillité. Le découpage de ses balcons filants lui confère un caractère aérien qui évoque les fondateurs de la coopérative des Ailes, tous employés de la compagnie Swissair, même si la minéralité de leurs parapets (en béton préfabriqué) vient contredire cette légèreté en les rattachant clairement au registre traditionnel et plutôt terrien de l’architecture.

 
Distribution
L’ambition collective de l’ensemble, la mixité d’affectations et l’hétérogénéité dimensionnelle des programmes à abriter ont naturellement engagé une réflexion sur la typologie distributive de l’édifice, avec en tête le souvenir marquant de l’unité d’habitation marseillaise de Le Corbusier. Les couloirs de distribution centraux, ouverts aux deux extrémités sur l’horizon, offrent des dégagements appropriables et des bancs pour l’attente sculptés dans le béton, chaque seuil de porte s’affichant de façon individualisée. Dans les étages inférieurs, un escalier à caractère public s’ouvre en façade sur la cime du Jura toute proche et relie les deux niveaux de socle à l’étage de bureaux en mettant en relation la place des Sports au rez inférieur avec la place de la Diversité au rez supérieur.

Regard
Le bâtiment ouvre l’ensemble de ses locaux sur un paysage exceptionnellement dégagé par un dispositif panoramique, une fenêtre en longueur continue. Chaque appartement bénéficie d’une loggia individuelle en forme de losange, véritable pièce extérieure supplémentaire, qui articule sa relation à l’horizon à la manière d’un caléidoscope en évitant toute frontalité. Ce dispositif géométrique vient apporter des qualités de vues surprenantes à des appartements majoritairement mono-orientés et adossés à la distribution centrale du fait de l’exigence programmatique initiale. Les plis de la façade contribuent en outre à apporter une qualité de lumière assez extraordinaire jusqu’au centre du plan en réduisant l’ombre portée des balcons sur la façade.

Matérialité
Dans une recherche d’apaisement de la présence du bâtiment, les matériaux restent bruts ou semi-bruts. A l’extérieur, le socle public du bâtiment, en contact avec le sol, est en béton coulé sur place et sablé. Les fenêtres et parties légères sont en aluminium thermo-poudré sombre tandis que les parapets de façade sont réalisés dans un béton naturel gris finement strié et préfabriqué qui réagit à la lumière avec la douceur d’un velours côtelé. A l’intérieur, une structure porteuse en béton armé apparent, des revêtements de sol des parties publiques en terrazzo, des portes palières et parquets intérieurs en bois de chêne, la céramique des locaux humides en grès de petites dimensions viennent prolonger le calme affiché sur l’espace public.

Economie et énergie
La surface moyenne brute par pièce OCLPF (principe de calcul genevois) est de 25m2. Grâce au faible taux de rendement pratiqué par la coopérative, les loyers résultants sont extrêmement modérés malgré le haut degré de finition de l’ensemble.
Sur le plan énergétique, les performances techniques et la technicité de l’enveloppe du bâtiment ont permis d’obtenir les labels Minergie A et Minergie P, l’approvisionnement de l’ensemble du quartier étant assuré par un chauffage à distance avec l’appoint d’un champ de panneaux solaires photovoltaïques.