Réalisée entre 1963 et 1971 par les architectes Georges Addor, Dominique Julliard, Louis Payot et Jacques Bolliger, la Cité du Lignon est le plus grand complexe d'habitation de Suisse. Cet ensemble monumental est composé de 84 allées, pour un total de 2’780 appartements.
Le plan masse articule trois corps bâtis ; deux tours au sud de la cité et un bâtiment d’un seul tenant qui se développe en se pliant sur plus d’un kilomètre, avec une hauteur qui varie entre 12 et 18 étages selon la topographie du terrain. Ce système d’implantation évite les vis-à-vis et favorise l’ensoleillement grâce aux typologies traversantes notamment.
Suite à une demande datant de 2002, un plan de site est adopté le 13 mai 2009 pour les bâtiments de logements, l’école et l’église. Cette mesure permet d’assurer la protection de l’ensemble et d’en assurer la rénovation de manière structurée. Si l’ensemble du Lignon conserve une remarquable homogénéité plus de 50 ans après sa construction, grâce à un système constructif rationnel et une mise en œuvre de qualité, des travaux importants sont requis afin de répondre au besoin de mise en conformité avec les normes énergétiques contemporaines et d’assurer la pérennité de l’ensemble.
Ainsi, une étude sur la rénovation des façades est commandée en 2008 par l’Office du patrimoine et des sites du Canton de Genève (OPS), le Service Cantonal de l’Énergie (ScanE), le Département de l’Urbanisme (DU) et le Comité Central du Lignon (CCL) au laboratoire TSAM de l’EPFL. Plusieurs options sont étudiées et trois variantes de rénovation « par l’intérieur » sont identifiées afin de permettre des interventions localisées par propriétaire, sans péjorer la qualité de l’ensemble bâti et tout en conservant le curtain-wall caractéristique du Lignon.
Jaccaud+Associés (J+A) a ensuite été mandaté par le CCL, organe réunissant l’ensemble des propriétaires, pour la dépose d’une demande d’autorisation de construire. Obtenue en août 2011, cette APA « cadre » offre aux différents propriétaires la possibilité de rénover leurs biens en mettant en œuvre une des trois variantes possibles de rénovation.
Suite à cela, J+A a rénové les façades d’une allée complète « prototype » au n°49 dont les travaux se sont terminés fin 2012. Ils se sont ensuite poursuivis pour différents propriétaires sur 30 allées de la « barre » dès le printemps 2017, tandis qu’une rénovation approfondie de la petite tour et de ses 240 logements a été terminé à la fin 2021.
COMMENTAIRE du jury
Cette réhabilitation au long cours (12 ans de chantier) s’est établie dans le respect du bâtiment existant, et surtout des idées qu’il portait à son époque. Ce nouveau regard sur le patrimoine moderne cherche aussi à établir une continuité entre des modes constructifs de différentes époques, sans altérer ni l’écriture architecturale d’origine ni les surfaces de logements. En témoigne, par exemple, l’utilisation d’un nouveau type d’isolant fin en aérogel, à l’incidence minime sur les épaisseurs des murs et façades. La finesse d’un tel travail a été rendue possible par un travail de recherche préalable, un inventaire constructif mené par les équipes de l’EPFL. La connaissance exhaustive du bâtiment a permis de proposer différentes interventions stratégiques, précises et de pointe, avec plusieurs variantes proposées aux clients. La réhabilitation est ici synonyme de coordination, voire de réorchestration sur le temps long, qui a permis aux 89 copropriétaires (!) comme aux trois agences engagées sur le projet de redonner son éclat originel à ce vaisseau de l’habitat des années 60-70.
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