COMMENTAIRE du jury

Cette réhabilitation de quatre maisons médiévales autour d’une placette minéralisée ne consiste pas seulement en une restauration des bâtiments, mais aussi en une restauration du lien social. Afin de contrer un projet immobilier spéculatif dans ce quartier historique, mais paupérisé, la ville a porté un projet à vocation sociale pour accueillir une galerie d’art, des ateliers pour artistes en déficience mentale et des logements. L’équipement comme les logements obéissent à une logique de stratification des époques, le contemporain s’appuyant sur les traces du passé. Ainsi, les matériaux (béton et bois) composent une marqueterie savante avec l’appareillage en pierre des bâtiments originels. Il en résulte un projet chaleureux et accueillant, propre à offrir une nouvelle vie à des bâtiments et, même un quartier, légèrement en souffrance. Leur démarche fait preuve d’une patience exemplaire et d’une absence de préjugés stylistiques. Leur démarche sans ostentation permet à chacune de leurs réalisations de s’affirmer avec pertinence et discrétion. Nul pastiche, nul fétichisme historiciste dans leur travail. Encore moins de stratégie facile du mimétisme (avec cette croyance naïve que copier le voisin serait le meilleur moyen de s’intégrer au contexte). L’écriture architecturale de Gay Menzel se remarque par son sens du dessin, des proportions et d’une modénature épurée qui ne tient qu’à eux. Sans parfois aller au-devant d’un relatif anachronisme qui rend leurs bâtiments souvent indatables. La valeur de leur travail tient aussi dans un malin plaisir à brouiller les cartes. Leurs projets ont beau coordonner différents modes de construction, des savoir-faire traditionnels comme des techniques de pointe, mixer parfois la pierre, le métal et le bois, à l’arrivée c’est l’unité qui prévaut. Difficile même, sur certains projets, de distinguer à première vue la partie « réhabilitée » de la partie « neuve » du bâtiment. Cette savante ambiguïté n’est pas qu’un simple jeu. Elle témoigne même d’une certaine philosophie sur la temporalité même des bâtiments. Proposer une architecture, c’est aussi faire preuve de modestie, s’inscrire dans une histoire urbaine déjà partagée et un temps commun.